L’échec comme révélateur de la motivation réelle
- advives
- 21 oct.
- 4 min de lecture
Lors de mes nombreuses années de coaching, j'ai observé qu'en surface tout le monde dit vouloir "progresser". Mais ce qui distingue réellement les athlètes qui avancent de ceux qui plafonnent, ce n’est pas la motivation en période de réussite. C’est la manière dont ils réagissent à l’échec. On touche là un pilier de la performance (peu importe le niveau).

L’échec, dans le sport, ne se limite pas à un mauvais résultat. C’est une réalité plus subtile : une séance qu’on n’a pas su tenir, une progression qui stagne, un plan qui ne donne plus les effets attendus. Et c’est là, dans cette confrontation entre l’intention et le résultat, que la motivation profonde montre son vrai visage. C'est d'ailleurs le cas aussi pour moi en tant qu'entraîneur, parfois le plan ne fonctionne pas exactement comme je le voudrais.
Je me suis donc plongé dans la littérature scientifique pour savoir s'il existait une relation entre l'échec et la motivation.
La lecture que l’on fait de l’échec
L’étude de Poczwardowski et Conroy (2002), menée auprès d’athlètes et d’artistes d’élite, éclaire ce point avec précision. Les chercheurs ont observé deux grandes façons de vivre l’échec.
Certains y voient une atteinte à leur valeur personnelle. Quand ils échouent, c’est eux qui se sentent remis en question sur leur talent, leur légitimité, leur place dans ce microcosme. L’échec déclenche alors une spirale émotionnelle : perte de confiance, autojustification, évitement de la prise de risque. La motivation, dans ce cas, se fragilise. Elle dépend d’un contexte où tout doit bien se passer pour continuer à exister. Oui mais voilà, rien ne se passe jamais comme prévu !
D’autres au contraire, interprètent l’échec comme un signal. Un message objectif à décoder : "qu’est-ce que ça dit de ma préparation, de ma gestion, de mon sérieux ?"
L’échec ne remet pas en cause leur identité, il les informe. Cette posture les rend capables d’analyser, d’ajuster et de relancer. Les chercheurs parlent ici d’une forme de tolérance émotionnelle à l’échec : une capacité à ressentir la déception sans se laisser dominer par elle. C’est précisément cette distance émotionnelle qui protège la motivation à long terme.
Les différents types de motivation et leurs impacts
Cette différence de perception évoqué plus haut n’est pas un hasard. Elle dépend du type de motivation qui guide l’athlète.
Quand la motivation repose principalement sur le résultat, la performance, le regard des autres, la validation externe, l’échec devient une "menace" directe. Le jour où la performance n’est pas au rendez-vous, tout se bouscule dans son esprit: l’athlète doute de lui, de son plan, de son engagement, de son entraineur, de son matériel, etc.
Par contre quand la motivation est ancrée dans le processus, dans la progression, l'analyse froide et rationnelle, l’amélioration personnelle, l’échec s’intègre naturellement. Il se digère mieux en quelque sorte. Il n’est plus perçu comme un verdict ou une sentence irrévocable. Il devient un repère. Un point d’appui pour corriger le tir et continuer à avancer.
Les athlètes étudiés par Poczwardowski et Conroy décrivent ce mécanisme avec clarté: la réussite ne les motive pas plus que l’échec ne les décourage. Ce qui les maintient dans la durée, c’est la cohérence entre ce qu’ils font et ce qu’ils cherchent à devenir. On touche du doigt quelque chose là !
Le rôle du cadre et du coaching
Dans un environnement bien structuré, l’échec perd son poids émotionnel. C’est là qu’intervient le rôle du coach.
Le coach ou l'entraîneur n’est pas celui qui empêche l’échec, mais celui qui y donne du sens. Quand un athlète sort d’une contre-performance, il n’a pas besoin d’être rassuré. Il a besoin qu’on l’aide à comprendre ce qu’il n’a pas encore maîtrisé. Cette approche transforme la déception en matière à travailler. On a déjà là un premier levier motivationnel.
Au fil des saisons, j’ai vu des athlètes perdre tout repère après une mauvaise course (les plus émotionnellement fragiles la plupart du temps), et d’autres s’en servir pour tout reconstruire. La différence qu'ils font lors des compétitions sur leurs adversaires ne tenait pas qu'à leur talent, mais à une capacité d'analyse froide et pragmatique. À prendre de la hauteur au lieu de s’enfermer dans la frustration. En tant que coach c'est un point essentiel pour évaluer si un athlète à réellement échoué ou non. Emotionnellement nous sommes moins touchés car nous ne vivons pas la course de l'intérieur mais avec un regard extérieur.
C’est là que la motivation se reconfigure. Elle quitte le terrain de l’émotion pour rejoindre celui de la lucidité. L’athlète arrête de chercher à prouver, il recommence à apprendre.
Le moteur caché
L’échec agit comme une mise à nu, et c'est ce qui est parfois le plus dur pour les athlètes. Ils ne peuvent pas se "cacher" dans leur routine de l'entraînement. L'échec révèle le vrai niveau de motivation, celui qui ne dépend ni du contexte, ni de la réussite, ni de l’humeur. Un athlète motivé par le sens de sa démarche rebondira toujours.
In fine la question à se poser ce n'est pas “pourquoi j’ai raté ?”, mais “qu’est-ce que j’ai appris ?”. La nuance est importante. À ce moment-là, la motivation change de nature. Elle devient plus stable, plus profonde, plus autonome. Elle n’a plus besoin d’être entretenue par les bons jours.
Alors, quel type d'athlète ou coach êtes vous?
Découvrez mes offres de coachings --> ICI
Référence scientifique
Poczwardowski, A., & Conroy, D. E. (2002). Coping Responses to Failure and Success Among Elite Athletes and Performing Artists. Journal of Applied Sport Psychology, 14(4), 313–333.
.png)





Commentaires